tu sombres
dans un lent rêve
au goût métallique
ton dos t’abandonne
tes vertèbres
une à une
s’envolent
à leur place
des biscuits chinois
des hiéroglyphes
que Patrick Dempsey déchiffre au scalpel
légère
tu te hisses hors de ta peau
regardes les fourmis travailler
d’en haut
ton corps
en papier bulle
années 90 ton corps
mélamine ton corps
buvard
noyée l’ancre avalée l’encre
avalés les rêves
avalée la beauté
avalée la beauté
avalée la naïveté
ton dos insatiable
ton dos
un drain
qui boit boit boit
s’abreuve de diagnostics
de mots inventés
de statistiques
ton dos boit l’inconnu
la peur la préadolescence
ton dos boit tes cheveux frisés
ta montre à velcro
boit tes premiers boutons
ton lit d’hôpital
boit les tiens-toi droite
boit la cortisone
boit la morphine, aussi
à force de frottements
stériles
un génie s’échappe de ton dos
sans un regard derrière
Camille Paré-Poirier, «tu sombres», Dis merci, Montréal, Les Éditions de Ta Mère, 2021, p. 66-67.